C’est l’histoire d’une tragédie. De mille tragédies, de millions, de milliards de tragédies. Elles se déroulent tous les jours sous nos yeux et nous ne faisons rien. Peut-être qu’il ne peut pas en être autrement. Peut-être. Mais au fond, qu’en savons-nous ? Qu’avons-nous fait avant de laisser tomber nos bras, ballants, le long de nos flancs, et de dire avec un air contrit « On ne peut rien faire » ? Nous sommes-nous épuisés à éviter les tragédies ?
Quand la misère, le chômage, le racisme, la violence, la maladie et toutes ces choses que les gens qui ne les subissent pas acceptent avec un courage tout simplement hallucinant, brisent des vies, des vies qui pourraient être les nôtres, celles de nos enfants, celles des gens que nous aimons, et même de ceux que nous aimons moins, que faisons-nous ?
Déjà des millions de morts du SIDA. Des millions. Qu’est-ce que ça veut dire, des millions ? La plupart d’entre-nous n’a même jamais compté jusqu’à mille, alors des millions ? On meurt encore de la rougeole. Des tonnes de bombes aussi sur des peuples innocents, au nom de guerres dictées par les intérêts financiers et politiques des puissants de ce monde. Mais même avec tout leur fric, ils ne pourront pas racheter les morts.
La famine existe encore, alors que nous mangeons des yaourts 0%. L’assistance qui sépare enfants et mères célibataires parce qu'elles n’arrivent pas à joindre les deux bouts avec un travail dégradant et sous-payé. Des gens assis par terre dans la rue, des gens qui crèvent de froid tous les hivers pendant que nous nous hésitons à acheter un vrai sapin, à cause des épines sur le tapis.
Et nous acceptons. Nous acceptons les enfants mutilés par les mines anti-personnel, nous acceptons la pauvreté, la souffrance, l’inégalité.
C’est l’histoire d’un monde où chacun, pour ne pas pleurer comme les enfants, quand à l’école on leur parle des camps de concentration et des arbres qu’on coupe, a fini par se former un écran d’indifférence devant ses yeux. Pour se protéger. Parce qu’on ne peut pas supporter toute la douleur du monde sur nos épaules.
Et rien n’enraye la machine infernale. Et la tragédie, les tragédies continuent. Il faut croire qu’on s’habitue à tout, et spécialement au pire, quand il concerne les autres.
13/02/2005
27/08/2003
Melancholia / Tristezza
Le rasoir, agressif, mord
La chair indolente et blanche
Passive et coupable.
L’Espoir fatigue et tue
Ce corps qui se réduit à néant
Les rêves ne sont plus que
Chimères grimaçantes
Echelles de corde pourrie
Vers un monde pathétique,
Froid comme le vide mortuaire,
Morbide refuge de l’esprit enchaîné.
Et la lame de l’horreur,
Providentielle, s’abat sur le cou
Du condamné pleurant
Abandonnant ses mains ouvertes,
Comme des miroirs, au Ciel…
Adeline, avril 2003
25/08/2003
Néant
Tout est si froid, vide, abrupt et désespérant.
Toute tendresse, tout sentiment, même négatif, a disparu.
Ce n'est plus qu'un désert moral, aride, laid, froid, noir, et silencieux.
Tout élan est voué à retomber pitoyablement au sol, à s'écraser plus bas encore que d'où il s'était vainement envolé.
Je ne veux plus croire. Plus jamais. L'Espoir est toujours déçu, rien n'aboutit, tout est vain, inutile, tout fini en poussière immobile dans le calme désert du désespoir.
Les yeux éteints, le cœur froid. Même les idées ne s'enchaînent pas. Toute la fébrilité humaine revient à soulever cette poussière inutilement, cette poussière plombée et pesante qui retombe aussitôt. L'aridité, la stérilité du monde des idées sont infinies face à l'Homme stupide.
A quoi sert de croire encore ? C'est se planter un couteau dans le cœur, et pour rien... Il ne reste plus qu'à attendre, attendre la mort dans l'ombre angoissante et interminable du temps. Puisque le Rien nous mène Nulle part, puisque tout est vide, puisque tous les chemins sont des cul-de-sac.
La funèbre beauté de cette horreur, purement calme me terrifie, mes yeux brûlent de rester exorbités, la fixant... L'horreur dans toute son impudeur, le fond de l'âme humaine, froid, vide, éteint...
Les poussières retombent lentement. L'agitation humaine revient au Néant, le néant nous aura malgré notre fébrile résistance, malgré cet absurde et farouche volonté qui nous agrippe à la vie, qui nous rend aveugles, qui nous fait refuser de voir son absence totale de sens, de but, d'utilité. Puisqu'après nous tout redeviendra pareil, puisque notre existence ne revient à RIEN... Puisque cette vie n'est qu'un silencieux ballet de pantins grimaçants, où l'atroce côtoie l'absurde, où l'horreur est vaine et hideuse...
[...]
25/06/03 at 23:48, listening to "She's lost control" by Joy Division.
______________________________________
Conneries en passant...
Nous ferons nos requêtes les yeux fermés
nous hurlerons nos bravades à la tête de l’empire
nous souillerons les murs de nos messages
Nous dirons NON, à tout, le temps qu’il faudra.
Nous repousseront la coupe d’argent où repose le vin
nous laisseront nos lèvres se dessécher et nos visages pâlir
Nous nous jetterons en bas des plus hauts murs
nous combattrons les trop grands, les trop forts
nous volerons sans fin sur les ailes de nos vingt ans
Nos poings seront noués
Nous pourchasseront les idées
Nous crierons :VIVEZ !
ils diront:
VOUS RÊVEZ TROP FORT!
Nous seront fous de désirs
Nous seront fous de colère
Nous seront les soldats de la Vie
Nous seront cerbères et sentinelles
Nous défierons la facilité
nous rirons comme des enfants
nous serons malins, mais jamais fourbes
Nous jetterons nos armures à nos pieds
et offrirons nos coeurs en pâtures
Nous nous battrons à mains nues
nous casseront nos ongles à votre béton
Nous offrirons aux trop pauvres, aux trop faibles,
notre pitié leur sera réservée
Nous chanteront du Ferré, du Desjardins, du Vigneault,
Nous serrons toujours présents,
et nos enfants après nous...
et leurs enfants...
"Nous" Isabelle Fortin-R.
Tant qu'ils ne sont pas directement concernés, les gens acceptent n'importe quoi"
Edmund White
"Les humains étant les animaux les plus aptes à s'adapter à tout, il n'est pas étonnant de les voir trouver parfois leur bonheur dans leurs chaînes... Et les convaincre alors de liberté représente une tâche ardue qui peut aller jusqu'à sembler absurde."
Gilles Vigneault
"L'ennui avec la télévision, c'est qu'on la regarde pour se changer les idées et qu'elle finit par nous laver le cerveau."
Robert Orben
"La politique ne consiste pas à faire taire les problèmes, mais à faire taire ceux qui les posent."
Henri Queuille, président du conseil sous la 4e république.
La dictature, c’est "ferme ta gueule" ; la démocratie, c’est "cause toujours".
Jean-Louis Barrault
"Les chefs sont des salauds puissants ; les sujets, des salauds en puissance."
Louis Scutenaire
"ANTIGONE. — Vous me dégoûtez tous avec votre bonheur ! Avec votre vie qu'il faut aimer coûte que coûte. On dirait des chiens qui lèchent tout ce qu'ils trouvent. Et cette petite chance pour tous les jours, si on n'est pas trop exigeant. Moi, je veux tout, tout de suite, — et que ce soit entier — ou alors je refuse ! Je ne veux pas être modeste, moi, et me contenter d'un petit morceau si j'ai été bien sage. Je veux être sûre de tout aujourd'hui et que cela soit aussi beau que quand j’étais petite — ou mourir."
"CRéON. - "Pour dire oui, il faut suer et retrousser les manches, empoigner la vie à pleines mains et s'en mettre jusqu'aux coudes. C'est facile de dire non, même si on doit mourir. Il n'y a qu'à ne pas bouger et attendre. Attendre pour vivre, attendre même pour qu'on vous tue. C'est trop lâche."
"Antigone" d'Anouilh
19/07/2003
Envie de pleurer.
De tout foutre en l'air.
Plus la force d'assumer, d'être forte, d'y croire.
Trop long, trop dur, trop désespérant...
Hurlement qui rebondit sur les murs aveugles et sourds.
Air mordant, peuple absent, terreur despotique...
Comment espérer ?
Pourquoi...
Juste dormir, juste oublier, ne plus voir, ne plus affronter, baisser les bras, baisser les yeux, fermer son coeur...
Et se laisser choir sur le sol.
Ne même plus penser, ne plus lutter, ne plus vouloir...
Laisser tout, autoriser tout, ne pas voir, ne pas entendre, ne surtout plus vouloir.
L'espoir est mort.
24/06/2003
Le matin, c’est glauque.
Le matin, c’est froid, vide et blanc comme un hôpital trop aseptisé.
Le matin a ce dénuement qui met en lumière tous les petits défauts que le soir, au contraire, noie dans sa spirale rouge et euphorique.
Le matin n’a ni poésie ni chaleur ; le matin, c’est laid.
Le matin, aliénation de l’implacable réveil qui me tire de l’échappatoire des songes, qui m'oblige à me faire violence pour sortir du lit et bouger.
Le matin est cruel, par la montagne des choses à faire, lorsque le corps n’aspire qu’au repos, à ce sommeil volé par la stridente injonction de la machine-à-tuer-les-rêves.
Le matin… le matin me donne des envies de crier sur tout le monde contre ce système d’éternelle répétition ; même rythme, mêmes choses à faire tous les matins, toujours pareil, toujours. Simplement hurler, sans but, contre une absurde remise à zéro, une annulation.
Le matin, ça donne envie de monter sur le toit pour admirer la fuite de la nuit contre son ennemi mortel, de voir la déchéance toujours répétée de celle qui est notre refuge, cette lutte acharnée et sempiternelle.
Le matin, c’est tellement absurde, toujours pareil, toujours sans but, grelottant de froid, pleurant de sommeil.
Le matin, c’est laid.
Le matin, quand seule et sans rien à faire, par un concours de circonstances exceptionnel, le matin sans contraintes, c’est aussi désespérant. Toutes les situations de solitudes matinales ouvrent la porte aux mutilations de ce corps difforme que la lumière blafarde me renvoie.
Matin d’horreur…
Matin rasoir.
Adeline, février 2003
La mort pleure dans sa cage,
Pauvre vieux monstre dans sa cellule aseptisée,
Aveuglée par la sauvage lumière blanche…
Ses ombres fuyantes fondues par l’hôpital :
Terrorisée, terrorisante et affolée.
Ses patient, un par un, lui arrivent,
Enchaînés, préparés, soigneusement triés.
Dans un épouvantable cliquetis de métal
La chaîne bien huilée de la civilisation
Lui apporte sa fade pitance,
Et la famille dégoûtée attend en silence
Derrière la pudique vitre dépolie.
Mort, ô Mort, ma vieille compagne,
Le monde t’a cachée dans un réduit
Le sacro-saint Monde veut t’oublier,
Toi sa faiblesse, sa honte, sa faille,
Tel un cauchemar jamais éteint,
Toujours refoulé, inavoué, éconduit.
Ô Mort, prends-moi dans tes grands bras glacés
Embrasse-moi avant de m’occire
Sois ma sœur, aime-moi, et fais ta besogne…
Adeline, avril 2003
23/06/2003
Il fait noir, obstinément noir. Depuis six mois le soleil s’est couché sur moi et ne se relèvera plus jamais. Un foyer de douleur brûle ma tête, chaque minute, chaque seconde. Ils m’ont enfermé dans une chambre d’hôpital. Je connais ma cellule sur le bout des doigts, prisonnier de cet endroit où nuit et jour riment avec indifférence.
La rêverie est mon seul échappatoire. Des souvenirs vienne inlassablement danser devant mes yeux vides. L’esprit plein de projets je me serais déjà vu architecte, designer, un créateur original voyageant dans le monde entier. Et toutes ces destinations rêvées, ces ébauches de bonheur, réduites à néant. Ces projets figés à jamais dans leur fraîcheur enfantine me sont plus précieux que mes prunelles aujourd’hui opaques.
Je repense encore à Vlad... Je l’appelle ainsi car tel est le nom que tout le monde lui donnait, je ne me suis en réalité jamais intéressé à ses origines, et son vrai nom m’importe après tout bien peu. Nous sortions discrètement à la nuit tombée, et allions nous promener dans la ville. Son grand caban, ses vêtements qui portaient la marque d’un raffinement daté d’un autre âge lui donnaient l’air d’un prince.
Cette nuit-là, il s’était proposé de m’emmener derrière la cathédrale et de monter discrètement sur les toits par une vielle échelle rouillée ; pour faire la visite par les coursives. Je le suivis, ravi par la perspective d’une ballade nocturne si palpitante.
Quand nous fûmes arrivés en haut, tout en haut, éreinté, il s’assit, ses jambes pendant dans le vide. Je fis de même. Puis je sentis son bras se glisser derrière mes épaules, s’enrouler… Un frisson me parcourut, et un instant j’hésitai avant de me laisser aller à son étreinte. Le sang dans mes veines sembla couler plus vite, et mon corps se réchauffer d’un degré. Un sentiment de toute-puissance nous envahissait, si seuls, si hauts dans la ville.
L’horloge sonna une heure. Nous contemplions le ciel noir d’encre dans lequel brillaient la pleine lune et les étoiles. Vlad nommait les constellations. Enlacés, nos visages face à face, le murmure suave de sa voix se perdait en un brouillard indistinct. Bercé par le flot de ses paroles, perdu au milieu d’une mer de songes et de légendes, je regardais sa bouche.
Elle était fine, bien dessinée, comme d’un trait de plume, et paraissait rouge sang à la lumière de la Lune, qui faisait ressortir la nerveuse pâleur de son visage. Le mouvement de ses lèvres, qui prononçaient des mots que je ne comprenais plus, était un appel. J’approchai ma main, en effleurai la si fascinante bouche. « chhhhht… » murmurai-je dans un souffle.
Ses yeux plongèrent dans les miens. Noirs, si noirs que la nuit en était pâle. J’hésitai… Il hésita… Et puis ma bouche vint se poser sur la sienne. Je sentis son étreinte se crisper ; il m’embrassa à son tour. Rassurés, nous nous regardions, sans plus de crainte ni de gène, rassurés car tout était dit.
Nos têtes cependant se faisaient lourdes, notre esprit se voilait. Nous redescendîmes, encore muets et égarés. Main dans la main, nous rentrâmes, ombres noires qui n’en faisaient qu’une, dans les rues ensommeillées de la ville. Nous débordions de rêves qui s’appelaient lendemain.
Le lendemain, en manipulant un récipient d’acide sous pression, je devais me brûler et perdre à jamais la vue. Cette nuit restera, tout au long de cette obscurité pathétique et misérable qu’est devenue ma vie, la plus belle, la seule qui compte.
Adeline, mars 2002
19/06/2003
La mélancolie me fait comme un long manteau gris, doux, moelleux comme une laine couleur perle, presque joli, pas beau non, mais presque joli. Mes yeux tous humides, déversent de lentes larmes de poésie sur mes joues. Oh, je voudrais pleurer, enfin, pleurer tous ces moments que nous n’avons pas eu, tous ces moments calmes, doux, silencieux, où nous nous serions appartenues.
Mes mains se referment sur le vide, sur un rêve depuis longtemps évanoui… Tu n’es plus mienne depuis longtemps déjà, et je ne peux m’en prendre qu’à moi-même pour n’avoir pas su te garder. J’aurais voulu jouer encore, et encore, avec tes boucles brunes. J’aurais voulu apprendre à te connaître autrement, apprendre enfin à être vraie, franche et simple, avec toi. Cesser aussi tous ces détours que nous avons pris, pour éviter l’essentiel… J’aurais voulu que tout ne se finisse pas aussi tristement. Je tends le bras, vers l’infini, vers toi, vers un souvenir si évanescent. Vain, mon geste est vain.
Je reste immobile, mes bras entourant mes épaules, si petite sous la pluie des regrets, si fragile, sans toi. La tristesse a une beauté particulière, les regrets une tendre amertume… Sans toi. Le vent se fait caressant, comme pour sécher les pleurs de son orpheline, incapable de retrouver seule son chemin.
La vie est fade, monotone. Amicale, très douce, sans heurts, mais si terne. Terne comme mon manteau de laine grise. Oui, tout est gris. Je n’ai que faire des tendresses de la pluie, du vent, de ma mélancolie. Sache, c’est avec toi que j’aurais voulu être tendre. Je ne puis rien effacer, et je peux pas non plus, je n’ai plus la force de revenir, de recommencer. Pourtant, je suis sûre qu’au final peu de choses ont changé. Rien de fondamental…
Sauf qu’un masque est tombé. Je sais ce que je suis, je suis ce que je suis. Je ne veux plus manier de marionnette, je ne veux plus ni mentir ni passer ma vie à me cacher dans l’ombre hideuse de l’hypocrisie. Tu sais, je t’aurais aimée… Si j’avais su trouver la force de faire tomber le mur, j’aurais ensuite bien pris soin de toi, je serais restée… M’aurais-tu laissée nager dans le vert de tes yeux, aurais-tu laissé ma main effleurer tes lèvres ?
Oh, je voudrais pleurer, enfin, pleurer tous ces moments que nous n’avons pas eu, tous ces moments calmes, doux, silencieux, où nous nous serions appartenues. Longtemps… Le temps s’étire comme un cotonneux nuage gris, dans le ciel de novembre… Tout est lourd, et gris, et silencieux. Et tu es toujours là, semblable et différente à la fois… Malgré les gens qui t’entourent, tes sourires, je ne sais que penser de ton âme… Est-elle vide et froide, y a-t-il encore, dans un petit coin, un endroit ouvert, une porte dérobée ? M’as-tu parfois regrettée… J’en doute, et c’est peut-être mieux ainsi.
Je devrais sûrement m’envelopper dans mon long manteau de mélancolie, noyer cette vaine tendresse, et partir, tourner le dos, loin pour abandonner mes souvenirs dans une terrifiante forêt aux hauts sapins verts et noirs.
Oui, le monde est féminin, et il berce ses orphelins, sa chanson est douce, calme et répétitive. Sa sagesse l’a mené à la résignation, et dans sa grande maison silencieuse, il soigne les blessés de la vie. Ses chastes câlins ne peuvent faire taire les cris muets de l’impitoyable mémoire, sa pâle beauté ne peut me faire oublier la tienne…
Oh, je voudrais pleurer, enfin, pleurer tous ces moments que nous n’avons pas eu, tous ces moments calmes, doux, silencieux, où nous nous serions appartenues…
A Toi,
VeRte
23/05/2003
Drôle de sentiment…
Je me sens fragile comme un vieux poupon de celluloïd, ses yeux vides, froids, inexpressifs comme les miens, tout chargé de souvenirs et de mélancolie.
Je voudrais mourir ce soir, aller paisiblement m’allonger dans mon lit, et ne pas me réveiller demain matin. Que l’harmonie, le calme désespérant de cette soirée s’étire et s’étiole vers l’infini sans que le froid et tranchant matin vienne rompre sa magie.
La tendresse d’une mère pour son enfant, tendresse pudique et innocente d’un ami d’enfance nouant ses bras autour de vous, en un vide muet et si doux, me semble si attirante, au milieu de mon désert glacé et sibérien, mon désert moral…
J’aimerais que la pluie me prenne dans ses bras pour m’endormir, et chante une douce chanson aux accents chauds et fatalistes, une de ces berceuses tziganes séculaires, toujours vraies, toujours identiques, toujours envoûtantes…
L’empire fastueux de la nuit, l’étreinte tiède des draps, la chape de lumière rouge des bougies ne s’éteindraient jamais, et le brouillard humide et mielleux de la musique ne se dissiperait pas, lui non plus. Comme si la féerie n’en finissait pas…
Ce soir, je voudrais être l’enfant de la Lune, pour qu’elle me cajole et murmure des mots rassurants à mon âme égarée…
Les larmes enfin libres délaveraient encore un peu mes joues crayeuses… Mais le jour ne se lèverait pas. L’horreur ne recommencerait plus éternellement. L’infâme cercle du quotidien, enfin brisé, giserait sur le sol tel un bracelet ouvert…
Jamais le blafard recommencement ne viendrait plus s’acharner sur nos âmes efflanquées.
Et l’enfer serait loin… les cauchemars de la terne existence, les chimères, enfin rangées pour toujours avec les peluches sur l’étagère.
Et moi, morte mais libre…
23/04/2003
Comment supporter un monde où on relègue le peuple au rang de spectateurs, qui regardent les loups se disputer le pouvoir dans l'arène...
Comment supporter un monde où les jeunes ne sont pas censés s'affirmer, puisqu'ils veulent nous faire apprendre la vie dans les livres de classe, en attendant d'être assez "grand" ?
Comment un monde où on nous dé-responsabilise pour mieux nous asservir ?Ce n'est pas parce que l'on est jeune que l'on ne peut pas défendre ses idées, prendre les décisions qui NOUS concernent, avoir nos opinions, nos préférences, les affirmer, les cultiver.
Pourquoi la majorité, aujourd'hui, ne représente-t-elle pas le passage à l'âge adulte, mais seulement un droit de faire n'importe quoi sans avoir à rendre de comptes ?
Pourquoi attendre d'être vieux pour se rendre compte que c'est entre NOS mains et celles de personne d'autre, que repose l'avenir !? Se défendre, s'informer, ne jamais être les victimes du "système" pour qui de toute façon nous ne sommes que des statistiques...
S'engager en politique.
Se cultiver.
S'ouvrir è des tendances, des personnes différentes.
Essayer de concrétiser ses rêves plutot que de cracher sur un soit-disant "monde pourri"
Comprendre que personne ne défendra nos idées à notre place...
Si personne ne fait avancer les choses, il est évident qu'elles ne s'améliorent pas seules !!!
EXISTER !
21/04/2003
Une vie à mettre certaines questions de côté
Soit par manque de courage pour accepter les réponses
Soit par impossibilité d’en trouver
Une vie à revenir sur ce qu’on s’est promis
En souffrant d’être malhonnête
Une vie où le poids du temps se projette
Et où on ne changera pas
Une vie où on a tout choisi sauf soi
Une vie à masquer ce qu’on est vraiment
Juste pour gagner du temps
Une vie à laisser filer
Car l’apparence est plus forte
Une vie où moins on se voit
Et mieux on se porte
Une vie où l’on trouve qu’il faut du courage
Pour s’avouer lâche chaque jour davantage
Une vie à mettre le masque qu’il faut
Pour monter plus haut
A faire des efforts
A dire oui à des gens
Dont on sait qu’ils ont tort
Une vie à parler de ce qui est mal
Et de ce qui est bien
Alors qu’on a soi-même
Jamais fait le point
Une vie à trouver ça sans importance
A se compliquer pour rien
Une vie entre deux quais
Où la voiture du milieu est un miroir cassé
Une vie à 10 à 20 à 30 ans
Où on ne pardonne pas plus qu’on ne comprend
Une vie où le hasard fait le reste
Une vie à chercher partout
Ce offrirait une chance de nier jusqu’au bout
Une vie où quand on comprend que c’est sa mémoire
Cette veine géante
On a fait un pas de plus dans le ventre
Une vie où ce n’est pas parce qu’on perd quelque part
Qu’on gagnera ailleurs
Une vie où le mal ne meurt pas mais se déplace
Une vie où une deuxième peau remplace la première
Une vie qu’on vide tous ses objets
Qu’on remplit de copies moulées dans une matière étrangère
Une vie où il fait froid comme dans un four éteint
Où on avance un couteau à la main
Une vie où plus on réfléchit
Et plus on se dit qu’on aurait préféré un fusil
Une vie à écouter aux portes en croyant que derrière on nous détruit
Une vie à changer de visage
Pour apprendre à se reconnaître
Où juste à mentir peut-être
Une vie où on ne s’attachera plus jamais à personne
Une vie à supplier pour qu’elle nous pardonne
Une vie où si on ne paie pas une fois le prix fort
On rembourse chaque jour d’un remords
Une vie qui n’est qu’un géant règlement de comptes
Où seule la manière diffère
Une vie où entre celle des autres et la nôtre
Souvent c’est la guerre
Une vie avec le père la mère et l’enfant
Et dans le futur du passé du présent
Une vie où le sang coule dans le temps
Un océan
Une vie où à trop vouloir tirer dans le tas
On tire sur soi
Une vie où on n’a rien à perdre
A faire en sorte que ça s’arrête
Une vie à ne rien faire pour que ça s’arrête
Une vie à chercher de l’aide
Pour sortir de son enfer tiède
Une vie à brûler
Et à regarder ses mains
Une vie sans trouver le calme
Une vie où finalement au bout du chemin
On ne regrette pas
Car une fois l’incendie éteint
Il ne reste plus qu’un tas de cendres froides
Et personne ne peut deviner ce qu’il y avait avant
Une vie pour rien
Ces paroles sont celles de la chanson "Une vie" par l'excellent groupe Toulousain "Programme".
En plus de vous le conseiller absolument, j'espère que ces paroles correspondent à quelque chose en vous et, qui sait, vous auront fait prendre conscience de certains aspects non-envisagés jusque là.
Hommage à The Cure, groupe absolument culte.
En 25 ans de carrière, plus de 20 albums...
Mythe incarné.
Aujourd'hui leurs concerts se font de plus en plus rares, mais apparemment, un album est prévu pour cet été, et une tournée pour cet hiver... Les Curistes pouvaient craindre l'extinction du groupe car un best-of est sorti l'an dernier...
Ce qui marque en général que la maison de disque manque de fric ou que le groupe s'engueule trop pour contester... Rappelons qu'ils sont chez Fiction record, label indé.
Pornography, Faith, Disintegration, Bloodflowers, Kiss me kiss me kiss me, sont sûrement leurs meilleurs productions...
A écouter absolument. Laissez donc tomber ce qu'Universal veut mettre à la mode pour renflouer ses caisses, et fréquentez autre chose que le rayon "actualité" de la Fnac...